Au Kentucky, le ciel s’empourprera en janvier, ce sera peut-être mon premier voyage, et j’irais sûrement dans les champs de tabac pour sanctifier un quelconque lépreux, bien avant une nouvelle épidémie… À Lanzarote, le mois d’après, j’entendrais geindre l’orage, dans un rêve emboité dans un autre rêve.

Cette fois-ci en mars, sur la mer du Labrador, je claquerais tout mon or et vendrais ainsi toutes mes idées de sainteté pour financer des guerres larvées qui ne devraient plus être latentes pour bien longtemps. En avril, à Orlando, pour que de drôles de crevettes mutantes puissent éclore, j’analyserais le cerveau de Kubrick qui lui-seul sait démystifier les oracles. En mai, dans l’Oregon, le sang sombre de toute une kyrielle de krills péchés coagulera, je retrouverais une autre jeunesse, me frayant un chemin parmi trop de gamins, tous revenus à l’état sauvage…
En juin, dans l’ethnie des Jivaros, j’inventerais un nouveau courant, à mi-chemin entre l’orientalisme et le jacobinisme et je verrais grandir ici mes parents.

En juillet, sur la Nèthe, j’infuserais dans cette rivière de Belgique quelque chose qui sera loin d’être transcendant, alors de nouvelles méthodes d’éducation seront colportées et les mondes parallèles se livreront à des bastons féroces. En août, à New-York, avec des lignes et des avenues droites qui s’orienteront toutes de façon à faire passer de mode la neurologie, j’administrerais le pays de telle façon à ce que les casiers et les panneaux d’affichage soient couverts d’affiches orientales, jusqu’à ce qu’on les recycle et les réemploie au service des cinémas indépendants.

En septembre à Johannesburg, la valeur des enluminures commencera à croître rapidement, jusqu’elle se dévalue lorsque je me cotiserais avec Cassandre pour qu’on puisse rouler en décapotable sur le Strip africain. En octobre, je te raconterais mon rêve quand le ciel se violacera d’une lueur crépusculaire, quand il n’y aura sûrement plus les conséquences de leurs péchés. En novembre, nous aurons en notre possession les œufs du monstre ; ces œufs qui ont tant sommeillé jusqu’à donner naissance à la morbide Saison Rouge.

Et en décembre, il ne restera plus qu’une vingtaine d’enfants sur la planète : des enfants de fermiers, frappés par des maux redoutables du jour au lendemain et comme remède on devra annihiler leurs intrigants vertiges, leurs pernicieuses et insoutenables céphalées, et leurs neurasthénies totalement inexplicables…

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